Un petit moment
Je pense que peu de celles qui passent par ici me contrediront : occuper des enfants en continu, ce n'est pas de tout repos. Surtout lorsque l'on attend comme le Messie le début des congés de l'homme, et que les congés de l'homme sont consacrés à un chantier (troisième été consécutif de chantier extérieur, j'ai fait promettre "pas quatre"...)., et qu'en plus de l'occupation des petits, on se retrouve aussi à gérer la surveillance (chantier=danger), à tenter d'organiser les sorties des grands pendant les heures de sieste de la mini, les siestes de la mini en-dehors de heures de fonctionnement de la bétonneuse, sans compter tout le reste du travail quotidien irrépressible (repas, lessives, nettoyage minimum, c'est décidé, le ménage est pour septembre), je ne sais pas vous, mais moi, à vingt heures, je n'ai qu'une obsession : POSER MON DERRIERE.
J'ai parfois l'impression que mes enfants sont impossibles à contenter, une activité terminée en appelle une autre, sans délai, et lorsque j'annonce la fin des réjouissances en ma compagnie pour cause de repas à préparer (pas de farniente perso, hein), c'est la soupe à la grimace. Pour moi qui suis partisan du ne-surbookons-pas-les-enfants, laissons-les-s'ennuyer, l'imaginaire-a-besoin-d'espace, c'est assez désolant. Je me souviens de mon aîné-Café à qui j'a dit un jour -il n'avait pas trois ans- : "Mais enfin, chéri, depuis ce matin, on s'est promené, tu as fait de la peinture, de la pâte-à-modeler, du vélo, on a écouté de la musique et fait un gâteau, je ne sais vraiment plus quoi faire pour te faire plaisir !!!" et qui m'a répondu, sourire charmeur en coin : "Un p'tit bout de saucisson ?!"...
J'aurais besoin d'une bouffe entre copines, mais elles sont toutes parties en vacances. Je m'offrirais volontiers quelques séances de ciné en solo, mais les grands-parents AUSSI sont en vacances (ce qui d'ailleurs n'est pas forcément déplaisant en ce qui concerne les BP, mais c'est une autre histoire). Je rêve d'aller voir Miro à Baden-Baden (Christiane me comprendra...)... ok, il y sera jusqu'en octobre. Alors quand, à 21h27 -fin des hostilités domestiques-, je suis allée sur le balcon griller ma clope hebdomadaire et que l'homme (très occupé à commander des pièces automobiles) m'a dit : "Ben tu m'attends pas ?!", j'ai dit : "Non."
J'ai un besoin viscéral d'un minimum de solitude. Pas beaucoup, quelques minutes dans la journée, mais seule, vraiment. En temps normal, j'ai mes ressources pour disposer parfois de ces petites respirations, et là elles me manquent. Alors ce petit moment à voir le jour finir et les réverbères s'illuminer doucement, il me le fallait.
La Baigneuse, Joan Miro, 1924