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madame mim
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madame mim
23 novembre 2009

22 Novembre

Décidément, cet automne est propice aux souvenirs de voyages...

Hier, nous étions le 22 novembre. Ce jour marque la fête de l'Indépendance du Liban, et, il y a 14 ans, à la faveur d'un voyage d'études, j'ai assisté aux festivités de ce jour-là. Ce voyage fut une opportunité saisie, un peu par hasard, il aurait pu se faire en Norvège ou en Roumanie... mais ce fut le Liban.

Cinq semaines n'ont pas suffi à voir toute la beauté de ce minuscule pays, à en saisir toutes les facettes, à comprendre son histoire si douloureuse. Contrastes, c'est le mot qui me vient en l'évoquant. La montagne qui commence dès que l'on quitte la mer, le passé antique prestigieux et le présent chaotique (en 1995, la fin de la "grande" guerre n'était pas loin, et de notre point de chute nous entendions régulièrement les bombardements sur la zone qui était encore occupée par Israël à quarante kilomètres de là), l'extrême richesse de certains héritiers croisés les week-end, et les petits gars auprès de qui je travaillais la semaine, qui économisaient les livres pour s'offrir quelques chewing-gums. Des immeubles en ruine, criblés de trous béants, et tout en haut, sur un pan de balcon encore debout, du linge qui sèche.

Ce sont aussi bien des visages, cette soeur tellement âgée et son humanité rayonnante lorsqu'elle s'occupait des plus miséreux dans les souks de Saïda (un pendant de Soeur Emmanuelle sans la médiatisation !), un petit déjeuner avec l'évêque de Jérusalem de l'époque qui nous a parlé de son amour pour la France en évoquant la version édulcorée spéciale séminaire des "Chevaliers de la Table Ronde", et tous ces enfants, qui découvraient la vie sans la guerre... Je me demande souvent ce qu'ils sont devenus. Certains ont l'âge d'être pères. Ont-ils seulement survécu aux épisodes de guerre qui ont suivi ? A cette époque, dans la petite communauté où je les ai croisés, tous, musulmans et chrétiens, cohabitaient en paix et dans le respect. Sont-ils ensuite tombés dans les extrémismes ? Sont-ils devenus des frères ennemis ?

Et dans ce contexte à vif, moi, je voulais tout voir, tout comprendre, et je me suis sentie libre comme jamais. Jamais avant, et plus jamais après. Peut-être parce que j'étais entourée de tous ces "survivants", et que la Vie elle-même prenait un autre sens. Peut-être parce que c'était la première fois que j'étais coupée de mon monde, de ma famille, de mes amis et sans tutelle aucune, et que j'en suis rentrée plus forte. Peut-être aussi parce que partir là fut ma première décision d'adulte.

Je suis restée dans le ressenti et seulement là, quelques années. Puis j'ai eu envie de comprendre. J'ai beaucoup lu, j'ai compris aussi que cette situation a quelquechose d'inextricable, de si complexe, que ce petit bout de terre est au centre de tant d'intérêts, que l'espoir que la situation se calme durablement, qui ne me quitte pas, paraît bien mince.

Bibliographie : Quand le soleil était chaud, Josette Alia (une fresque familiale très documentée qui décrit parfaitement l'enchevêtrement des évênements qui ont conduit à la guerre) ; La maison sans racines, Andrée Chedid (un roman poignant sur le début de la guerre)

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Commentaires
A
ton témoignage...Encore un point commun entre nous. Je suis partie seule ne Afrique sur un coup de tête et contre l'avis de tous. Cela m'a transformé et mon regard sur la vie n'est plus le même depuis. Pas de guerre là où je vivais mais une précarité, des enfants malades...et pourtant tout le temps l'espoir. Je dis toujours à mon mari que j'aimerais que nos enfants puissent vivre un telle expérience.
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